Nombreuses sont les entreprises qui ont été durement impactées par la crise sanitaire. Celles qui sont en difficultés ont jusqu’à début octobre pour se manifester auprès du tribunal de commerce.

Et lorsque l’entreprise se trouve déjà en état de cessation de paiement ?

Le dirigeant est tenu, dans un délai légal de 45 jours, de déclarer au greffe du tribunal son état de cessation des paiements, et demander au tribunal l’ouverture d’une procédure (judiciaire et publique) de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire. Il peut toutefois également de demander au Président du tribunal l’ouverture d’une conciliation (procédure amiable et confidentielle) ouverte nonobstant un état de cessation de paiements dès lors qu’il est avéré depuis moins de 45 jours.

En raison de l’état d’urgence sanitaire, toutes les entreprises qui se sont retrouvées en cessation de paiement entre le 13 mars et le 23 août dernier (période qualifiée d’«Etat d’urgence sanitaire »), ont bénéficié, de plein droit, d’une parenthèse puisque le délai de 45 jours ne commence à courir qu’à compter de cette dernière date.

En d’autres termes, les entreprises s’étant retrouvées en état de cessation des paiements entre le 13 mars et le 23 août, disposeront d’un délai expirant au 7 octobre prochain (soit 23/8 + 45 jours) au plus tard, pour solliciter l’ouverture d’une procédure.

Il est donc vraisemblable d’ici au 7 octobre prochain, que des entreprises fragilisées, aidées jusqu’ici par les mesures gouvernementales, se trouvent contraintes de solliciter l’ouverture soit d’une conciliation auprès du Président du tribunal (puisque cette procédure est également ouverte à l’entreprise qui se trouve en état de cessation de paiement depuis moins de 45 jours), soit d’un redressement judiciaire.

Le dirigeant qui ne solliciterait pas l’ouverture d’une de ces procédures dans ce délai s’expose à ce que le caractère tardif de sa démarche lui soit ultérieurement reproché.

Mieux vaut toutefois saisir le juge avec quelques jours de retard que de ne pas agir ou retarder encore cette démarche. L’idée est bien d’anticiper les difficultés et de se rapprocher du tribunal le plus en amont possible lorsque les premiers signaux de difficultés apparaissent, et non une fois l’activité définitivement compromise.

Si la loi a mis un terme à l’état d’urgence sanitaire (jusqu’à la prochaine mesure gouvernementale), impliquant un retour aux règles habituelles définies au Code de commerce, le chef d’entreprise bénéficiera encore de quelques aménagements limités dans le temps au 31 décembre 2020 spécifiquement pour la procédure de conciliation qu’il n’est pas inutile de rappeler ici.

En effet, jusqu’au 31 décembre 2020 uniquement, en cas de conciliation en cours à cette date, lorsqu’un créancier exige le règlement de sa créance et/ou n’accepte pas de suspendre ses poursuites durant les négociations menées par le conciliateur, l’entreprise peut demander au Président du tribunal, sur simple requête :

=> qu’il interrompe ou qu’il interdise temporairement à ce créancier d’agir en justice contre elle pour obtenir le paiement de la somme d’argent qu’elle lui doit ou la résiliation d’un contrat pour ce motif ;

=> qu’il arrête ou qu’il interdise temporairement toute procédure d’exécution visant à saisir ses meubles ou ses biens immobiliers de la part de ce créancier ;

=> qu’il gèle jusqu’à la fin de la conciliation le règlement des sommes dues à ce créancier.

Cette règle s’inspire d’une certaine manière de ce qui est prévu en procédure collective pendant une période d’observation (L 622-21 du code de commerce) et se trouve transposée provisoirement en phase de conciliation.

Il faut ajouter que, selon les règles habituelles en la matière (article L 611-7 du Code de commerce), la société peut également demander au Président du tribunal, après avoir assigné devant lui le créancier récalcitrant, des délais de grâce ou un report pur et simple dans la limite de deux années ; La décision ne sera pas susceptible de recours. En cas de cumul de ces deux outils, (gel pendant la conciliation et délais de paiement), les délais accordés par le Président pendant la durée de la conciliation seront décomptés des délais de grâce accordés).

Ces mesures tout à fait dérogatoires du droit commun et limitées dans le temps (jusqu’à nouvel ordre) sont destinées à protéger davantage encore l’entreprise victime de la crise sanitaire.

Mais il n’est jamais inutile de rappeler qu’indépendamment de ces mesures dérogatoires et temporaires, la conciliation, comme le mandat ad hoc, présentent l’intérêt majeur d’offrir au chef d’entreprise un cadre de négociation confidentiel et sécurisé, lui permettant, avec un taux de succès important, de rebondir et d’éviter le recours à une procédure collective, ou parfois de la préparer (par exemple dans la perspective d’un pré-pack cession).

Source : http://www.bblma.com/